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La plus secrète mémoire des hommes, littéraire et bienvenu

La condition humaine, une figure imposée au collège

L'anomalie, l'amorce d'une série ?

L'ordre du jour, bien ficelé

Vivre vite, vite lu


La plus secrète mémoire des hommes, littéraire et bienvenu


Ce livre est peut-être la meilleure chose qui soit arrivé à l'humanité, ou tout au moins à la littérature, en ce premier quart de XXIe siècle. Désigné à l'unanimité par le jury du Goncourt, La plus secrète mémoire des hommes met tout le monde d'accord. Le texte est au dessus des partis, impartial en cette époque ultra-politisée, alors qu'il évoque des évènements hautement politisables. En refusant de faire autre chose que de la littérature, le héros ne fait preuve d'aucune lâcheté, bien au contraire. En disant les choses comme elles sont, il rend justice à la vérité, à la lucidité et à l'humilité.


Podium. Mérité
Au podium du Goncourt

La langue est superbe, authentique, rigoureuse et inspirée. La construction est implacable : logique, équilibrée, fluide et cohérente. Le plaisir de lire est total, rendant l'oeuvre apte à devenir un classique, quelque-part entre les romans de Kessel et ceux de Stendhal. De loin le meilleur ouvrage paru dans les vingt-cinq dernières années ayant atterri entre les mains de votre serviteur.


Référence : le texte a été lu dans l'édition de 2021, chez Philippe Rey et Jimsaan.


Lire aussi l'hommage rendu par l'écrivain et éditeur Felwine Saar.



La condition humaine, une figure imposée au collège


Ce livre est construit autour de personnages forts dont les destins s'entrecroisent sur fond de guerre civile chinoise dans les années 20 (1920). On a l'impression que l'auteur a d'abord défini avec précision les contours de ces caractères très marqués, très différents les uns des autres, avant de les inscrire dans une succession de faits historiques à travers une séquence d'interactions de natures variées, depuis l'opposition franche et brutale jusqu'au dialogue serein entre un maître spirituel et son élève, en passant par des amours compliquées et des discussions à caractère politique. Les profils des six protagonistes principaux sont extrêmes et extrêmement divers, y compris dans leurs origines, Russie, Japon, Allemagne, France ou Chine. Ce roman fait partie des programmes de français du collège depuis des décennies. Pourtant le texte est complexe, le style très nourri de considérations psychologiques, spirituelles et philosophiques comme si Malraux se cherchait en permanence à travers les états-d'âmes de ses personnages. On se demande qui il aurait préféré être.


Une silhouette d'homme derrière une vitre en verre dépoli
Ombres chinoises

Relu à l'âge adulte, La condition humaine reste difficile à lire, demande un véritable effort pour entrer dans cet univers et essayer d'en comprendre les ressorts historiques. Pendant le premier tiers de l'histoire, il est malaisé de savoir qui roule pour qui, avec qui, et pourquoi. kuomintang, Komintern, Han-Kéou ne sont que quelques exemples de mots à décoder soi-même, sans aucune aide de la part de l'écrivain qui suppose que chacun maîtrise l'histoire de la Chine et de sa politique.


La dernière page tournée, il reste le sentiment d'avoir lu une langue unique en son genre, un français châtié et moderne probablement parlé dans les milieux intellectuels francophones de l'époque, pétris de culture et d'actualité, avides de concepts, de raisonnements et d'introspections partagées.


Référence : le texte a été lu dans l'édition Folio.



L'anomalie, l'amorce d'une série ?


Ce Goncourt bat des records de vente. Il faut dire qu’il est original (par rapport aux autres Goncourt). Il coche toutes les cases correspondant aux attentes de lecteurs du moment, comme en témoignent des commentaires récurrents glanés sur les forums : « enfin le roman idéal que je rêvais de lire », « j’en ai rêvé, H. Le Tellier l’a fait » … Suspense, sens de la vie, variété de personnages permettant de s’identifier sans trop de peine à l’un d’entre eux, structure claire, humour bien dosé, écriture fluide, trame à la fois cohérente et décalée, thèmes actuels, documentation solide, tout est fait pour donner à ce livre le succès qu’il mérite. Néanmoins, une fois la dernière page tournée, il est difficile de cerner l’âme du livre, de se rappeler une émotion particulière - quelle que soit sa nature (à noter : sur les forums, les commentaires relatifs à la fin du livre sont plus nuancés).


Un seau à champagnes
Champagne

Lors de l’annonce de l’attribution du prix une visioconférence mit en scène un dialogue avec l’auteur. Il y fut question de l’adaptation éventuelle du livre en série et tout le monde tomba d’accord sur la logique d’un tel projet. L’univers du livre s’y prête, une de ses idées centrales consistant à créer des « binômes » d’un nouveau genre permettant d’en imaginer une quantité infinie, issus de tous les milieux et confrontés à toutes les situations. Il y a là la matière de plusieurs saisons de l’Anomalie.


Référence : le texte a été lu dans l'édition d'août 2020 (Gallimard, Blanche)



L'ordre du jour, bien ficelé


Citation (page 118) : " Et ce qui étonne dans cette guerre, c'est la réussite inouïe du culot, dont on doit retenir une chose : le monde cède au bluff ". L'ordre du jour décortique quelques moments clés du basculement du monde dans la deuxième guerre mondiale. Chacun se fait une idée de ce que doit être un Goncourt, même si elle peut être éloignée de la position des légitimes. Les uns le veulent original, innovant, révélateur, d'autres le veulent justifié par des mérites passés non encore récompensés, ou laissent parler leur penchant pour la politique et cherchent à aligner leur choix avec leurs convictions. Le genre de ce Goncourt est un récit, comme l'annonce la mention figurant sur la couverture, mais c'est aussi un roman, un roman historique, car il faut bien, comme toujours, connecter les points. Il se trouve que les points sont plutôt serrés, donc que la place laissée à l'imagination est relativement étroite. Il en reste suffisamment, en revanche, pour l'interprétation.


En réalité ce récit se rapproche souvent de l'essai. Il est littéraire, dans le sens où il crée des évidences brillantes tout en convainquant le lecteur qu'illustrer l'inverse des thèses avancées serait tout aussi facile pour l'auteur, s'il le souhaitait. D'ailleurs les propagandistes de l'époque l'ont fait. Il faut donc contrebalancer la réclame faite par les monstres de l'époque, et en même temps prévenir les effets de celle de leurs successeurs éventuels.


Référence : le texte a été lu dans l'édition d'août 2021 (Babel)



Vivre vite, vite lu


Cette fiction se frotte de près à la réalité. Les tronçons imaginés comblent les trous de l'histoire d'un accident mortel. Il faut faire un choix : soit lire le livre en sachant que l'autrice est concernée par le drame, soit l'oublier et faire comme s'il s'agissait d'un roman pur sucre. La deuxième option est la plus intéressante. Elle permet de ne pas trop s'apitoyer ou au contraire de ne pas s'irriter d'être convié à partager une intimité peu ou pas désirée. La nouveauté du livre - car un Goncourt se doit d'être innovant - tient à la parfaite franchise de la narratrice, à l'aveu de ses faiblesses et de ses contradictions là où d'autres, compte-tenu du sujet, auraient ressassé le malheur de ceux qui restent ou laissé éclaté une colère sans cible. Car pourquoi parler de ses doutes, de ses défauts même, lorsqu'on raconte une catastrophe personnelle ? Tout simplement pour éviter de se mentir, de fuir la plus infime tentation de déni qu'elle soit liée ou non à l'affaire, car ils empêchent de rebondir après un choc. Enfin, si la structure du roman semble originale, en réalité le "jeu des si" est couramment utilisé dans les ateliers d'écriture et forme par exemple la trame du livre d'Isabelle Carré paru 3 mois avant. Un des nombreux mérites de Brigitte Giraud est d'avoir sublimé l'exercice.


Référence : le texte a été lu dans l'édition d'août 2022 (Flammarion)



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